Des valises dévalent la descente vers le ponton avec des bruits sourds de grosse caisse montée sur roulettes. Ce mardi 20 février au port de Royan, les matelots réembarquent après un mois d’absence. Équipages internationaux : les Portugais du « Cap Horn II » sont arrivés les premiers ; les Sénégalais du « Sherpa » suivront. Sur un banc à l’aplomb du bassin, une paire de retraités plonge le bouchon de sa curiosité sur cette séquence insolite. À 00 h 01 dans la nuit de mardi à mercredi 21 février sera levée l’interdiction de pêche qui a contraint 450 navires du golfe de…
Des valises dévalent la descente vers le ponton avec des bruits sourds de grosse caisse montée sur roulettes. Ce mardi 20 février au port de Royan, les matelots réembarquent après un mois d’absence. Équipages internationaux : les Portugais du « Cap Horn II » sont arrivés les premiers ; les Sénégalais du « Sherpa » suivront. Sur un banc à l’aplomb du bassin, une paire de retraités plonge le bouchon de sa curiosité sur cette séquence insolite. À 00 h 01 dans la nuit de mardi à mercredi 21 février sera levée l’interdiction de pêche qui a contraint 450 navires du golfe de Gascogne à rester à quai depuis le 22 janvier. Et à Royan où l’essentiel de la flottille était sous le coup de cette mesure visant à prévenir les captures accidentelles de dauphins, le port se videra comme un lavabo trop plein.
Flottille libérée, patrons de pêche enjoués ? Le tableau affiche au contraire des mines tendues. Une saignée de lassitude plus que les stigmates de la fatigue. Mais on s’interpelle tout de même pour connaître l’heure à laquelle le voisin larguera les amarres. Alan Gomes a décidé que ce serait à 5 heures. « À bord, nous serons cinq ! » Son « Sherpa », un 15 mètres, est armé de filets de fond. Le navire appareille pour la sole et mettra le cap à une cinquantaine de kilomètres au large de Lacanau, marée de quatre jours pour s’afficher à la vente lundi prochain.
Tous les deux jours à bord
Le marin a traversé ce mois dans une routine encadrée par l’obligation de venir surveiller le navire mais sans jamais pouvoir engager des travaux d’entretien et de réparation qui auraient permis d’amortir le temps perdu. « C’était interdit, c’est absurde. Seul le patron pouvait monter à bord, je n’ai donc pu faire que du petit bricolage… » Tous les deux jours, le Saujonnais est ainsi venu mettre en route la machine. « Deux heures à chaque fois pour tout vérifier : moteur, hydraulique, arbre d’hélice, gouvernail… parce qu’un navire qui ne tourne pas se dégrade. »
Le regard du trentenaire accroche le ponton d’à côté où est accosté le « Kalimero ». Des ouvriers s’affairent à bord. Lui reste encore à quai. « Son patron est bayonnais, il n’a pas pu venir aussi souvent. Le bateau a failli couler, détaille Alan Gomes qui a juste eu le temps de donner l’alerte avec un collègue. Cale, machine, couchettes, tout était noyé. »
Le patron du « Sherpa » est inquiet, la météo ne sourit pas. Une dépression s’annonce ce jeudi 22 février, creux de 7 mètres et rafales à 110 km/h. « Des conditions limites mais un mois à quai sans être payés… » Pas d’autre choix que de tailler la route. Le gouvernement a annoncé des aides pour étaler la perte de chiffre d’affaires et des formalités administratives allégées pour que les premiers versements interviennent dès mars. « Qu’on nous arrête, pourquoi pas, mais qu’on nous indemnise aussitôt, commente un rien désabusé le patron. J’attends encore l’argent promis l’an dernier quand on nous avait contraints à 40 jours d’arrêt biologique pour préserver la sole. »
Aussi, n’imagine-t-il pas toucher les 80 000 euros liés à ce dernier arrêt avant l’an prochain. Mais l’avance aux matelots, il devra la faire sans attendre. Alors les promesses… Alan Gomes leur trouve encore moins de charme que la routine.
Le manque de visibilité
Sur le pont d’un navire, on ne connaît de certitudes que celles de l’instant : supporter les coûts fixes, les charges d’amortissement qui, elles, n’ont pas été mises en jachère. « Sur la période, entre l’assurance, les petites réparations et l’amortissement de l’emprunt, le navire m’a coûté 380 euros par jour ; 11 400 euros pour le mois d’arrêt. »
Mettre la marche avant, les cartes ne tracent pas d’autre choix, route étroite. « C’est ça ou une corde ! », résume d’un trait sec Christophe Bénéteau, le voisin de ponton. Patron du « Cap Horn II », il a engagé un million d’euros pour acheter un fileyeur et les dettes qui filaient dans son sillage. Et en novembre dernier, rattrapé par l’âge du navire, le capitaine a dû revoir son banquier : moteur HS. Pour enjamber cette réparation et l’interdiction de pêche qui prend fin, nouvel emprunt, de 150 000 euros cette fois.
La phrase que ces marins partagent, c’est celle du « manque de visibilité ». Quelques mois seulement après que ces deux-là ont misé sur l’avenir, l’Union européenne restreignait en 2022 de 37 % le quota de soles dans le golfe de Gascogne, autrement dit leur droit de pêcher une espèce capitale pour eux. Comment, dans ces conditions, poser un budget prévisionnel solide et tenir ferme la barre de l’entreprise ? Les dauphins s’en tireront peut-être mais, pour les pêcheurs, il est évident que ça ne roule pas sur des roulettes.
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